#6 La bague cocktail

La bague cocktail naît avec la prohibition en 1920. Comme vous le savez, l’interdiction aux Etats Unis de la vente d’alcool va provoquer l’apparition de distilleries clandestines qui vendent leurs produits aux bars, tout aussi clandestins. Or l’alcool de contrebande est imbuvable. La seule solution est donc de le mélanger. C’est comme ça que naissent les cocktails.

speakeasy
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Les bars qui appelés speak-easy, parce qu’on demandait aux clients de commander en parlant doucement, sont des univers très masculins. Les femmes les plus émancipées rêvent d’y aller. Mais quelle femme ? Appelée The Flapper, c’est une garçonne, stylée, qui fume, se maquille, portent des jupes courtes (pour l’époque s’entend), aime le jazz et boit de l’alcool. Alors quand elle est là il faut qu’elle soit vue. Et qu’on la voit en train de boire. Pour attirer l’attention sur la main qui tient le verre, elles se mettent à arborer des bagues colorées et imposantes. Des bagues qui n’ont aucun des marqueurs sociaux habituels c’est-à-dire qui ne ressemblent pas à une bague de fiançailles par exemple. La bague est donc très voyante en taille comme en couleur. C’est un signe de rébellion par rapport à tout ce qui se fait jusqu’alors. Son opulence souligne l’excès que revendique la Flapper.

flapper

Puis le temps passe, la bague cocktail reste. Simplement la valeur un peu sulfureuse et féministe s’estompe. Les femmes ont pris l’habitude de porter une bague significative lors des événements auxquels elles sont invitées. A partir des années 60, les joailliers s’emparent de cette tendance pour proposer des volumes qui valoriser la couleur des gemmes. Par exemple Fred lance la forme « pain de sucre », qu’il imagine même interchangeable pour que la couleur des gemmes soit assortie à la tenue.

Fred

Puis la bague cocktail tombe un peu dans l’oubli jusque dans les années 80 où tous les joailliers la réinventent parce qu’elle permet l’utilisation des pierres fines et non plus seulement précieuses.

Celles qui m’amusent le plus est celles de Piaget dans la collection « Limelight Inspiration Cocktail », on trouve une bague appelée « Mojito » où la tourmaline bleue (de 24.57 carats quand même) est assortie d’une tranche de citron en citrine de 3 carats.

Piaget cocktail

Ou encore le modèle « Lemon-Fizz » où sur un quartz lémon sont posées 2 cerises en rubellite. Il y a aussi la bague « Whisky on the Rock » où sur la citrine taille coussin et on trouve des quartzs polis comme des glaçons givrés.

Piaget cocktail

Dans les années 2000, c’est Victoire de Castellane pour Dior qui réinvente la bague cocktail. Avec des formes inédites comme les crânes ou des pierres inusitées comme la morganite. En 2008, pour la collection « Belladone Island » elle imagine carrément des fleurs carnivores venant d’une île imaginaire dont les bagues sont émaillées, articulées avec des pierres en suspension dans un enchevêtrement de formes inédites.

Dior Victoire de Castellane

Aujourd’hui, la bague cocktail peut être plus subtile. La pierre centrale peut être moins grosse, le côté imposant est maintenant donné par la composition des pierres. Ce qui fait qu’elle est cocktail c’est la couleur. Et c’est le dessin qui donne l’intention, la lecture du bijou.

Par exemple, la bague Ciottoli de Mellerio rend hommage aux îles Borromées qui est à la fois le berceau de la famille Mellerio et le lieu emblématique de l’élégance italienne. La bague évoque la forme des galets de la plage avec une émeraude taille coussin (4,52 carats) entourée de pleins de pierres taillées ou en cabochon où se côtoient les chrysoprases et les émeraudes, de saphirs bleus ou violets, et les diamants.

Mellerio

Pour la bague NKUMA qui résulte de l’association de la Maison Mathon avec l’artiste Emeline Piot, la recherche des formes est une pure poésie. De profil on voit 2 papillons posés sur un rayonnement floral mais si on regarde au dessus la scène change : les papillons bleus émaillés enserrent un spinelle de feu. Il a fallu 370 pierres pour composer cette flamboyance de couleur.

Mathon - Emeline Piot

La bague cocktail n’a pas fini de nous surprendre et se réinventer. Elle n’a qu’une seule règle, on la porte comme on veut, plus spécifiquement à droite et en aucun cas à l’annulaire gauche.

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