Le mot kord est la racine indo-européenne du mot cœur qui désigne à la fois la notion de centre, de sentiments et d’intelligence. C’est-à-dire qu’on pense et on ressent dans un cœur qui se situerait au milieu du corps… vers le nombril !
Transformé en cor, cordis en Latin, il signifie alors « siège de l’intelligence et de la mémoire, des sentiments et de la volonté ». cette conception va évoluer. Par exemple, quand Corneille dans le Cid (1637) demande par la bouche de Don Diègue: « Rodrigue as-tu du cœur ? », il lui demande en fait s’il a des corones, pardon du courage !
Retournons à l’antiquité : le cœur donc, centre des sentiments est traditionnellement matérialisé par une feuille de lierre. La plante restant verte en hiver comme été, est donc chargée d’incarner l’amour durable.
Ce n’est pas l’acception retenue par Boucheron lors de la présentation à la Fashion Week de la collection Nature Triomphante qui est justement représentée par des lierres. Mais à y repenser les feuilles, très naturalistes, montées sur trembleuses pour ce magnifique collier point d’interrogation évoqueraient bien un cœur qui bat !
Des grecs aux romains, le dessin du cœur-lierre se stylise et commence à ressembler à la forme aujourd’hui communément admise.
On voit bien apparaitre dans cette Couronne de feuilles de lierre et corymbes en or (Troisième quart du IVe s. av. J.-C. – Apollonia – Thessalonique, musée archéologique © Hellenic Ministry of Culture and Tourism/Archaeological Receipts Fund) le symbole familier du cœur stylisé.
Au Moyen Age, deux représentations sont utilisées. L’une est réaliste et est peu à peu supplantée par la symbolique inspirée de l’antiquité. D’autant que le dessin anatomique est rendu difficile par l’Eglise qui interdit les autopsies.
La légende du « coeur inscrit » désigne un miracle attribué notamment à saint Ignace d’Antioche qui se désignait comme « Théophore ou Christophore » c’est-à-dire portant le Christ dans sa poitrine. Lorsqu’après sa mort l’empereur fit extraire le coeur de saint Ignace, il y trouva inscrit en lettres d’or le nom de Jésus Christ.
Le cœur se disait alors Cuer comme la collection de de Grisogono.
Au XIIe siècle, nait la légende du cœur mangé qui met en scène un triangle amoureux : à la fin l’amant se fait toujours tuer et, par ruse, le mari fait manger le cœur du défunt amant à sa femme. Chaque version contient plusieurs variantes comme les prénoms et les décors.
Toutes les histoires sont différentes car elles ont été écrites entre le Moyen Âge et le XIXe siècle plusieurs versions se succèdent : le Lai de Guiron dans le roman de Tristan et Iseut, l’Histoire de Guillem de Cabestany repris notamment par Stendhal, Le lai d’Ignauré de Renaut de Beaujeu (XIIIes), Le Roman du Châtelain de Coucy et de la dame de Fayel, le Décaméron de Boccace (1350), les Mémoires de la cour d’Espagne de Marie-Catherine d’Aulnoy (1690), «Le cœur mangé » de Jean-Pierre Camus, théologien, dans les Spectacles d’horreur (1630), La vengeance d’une femme publiée dans un recueil de nouvelles : Les Diaboliques par Jules Barbey d’Aurevilly (1874). Pour cette légende la représentation du cœur est stylisée.
Il paraitrait que même, Léonard de Vinci utilisait parfois le symbole sur ses schémas du corps humain en lieu et place d’une illustration réelle du cœur, lorsqu’il voulait simplement en afficher l’emplacement.
Cependant il a aussi fait des recherches précises sur cet organe comme on le voit dans son dessin « Cœur et vaisseaux » vers 1490. Car il estime, comme beaucoup de peintres de la Renaissance, que la représentation de la figure humaine est un des objets essentiels de l’art et à la différence des autres il se moque souvent des interdits de l’Eglise.
A toutes ces représentations symboles de l’amour se superpose celle du Sacré-Cœur.
Elle a pour origine le cœur transpersé sur la Croix qui donne la qualité divine au cœur de Jésus. Cette dévotion se propage grâce à, sainte Marguerite Marie, religieuse de la Visitation (1646-1690) qui dessine le cœur que lui a montré le christ dans une vision. Cette initiative va fixer la représentation du Sacré-Cœur qui sera reprise dans la joaillerie épiscopale ou chrétienne.
Dans les Archives Mellerio vers 1895 on trouve un dessin de Broche cœur anatomique flamboyant.
Alors bien sûr Dali va aussi être captivé par cette symbolique et quand il se met à créer des bijoux, il va produire 3 versions d’un cœur à mi chemin entre l’anatomique et le sacré.
Le « cœur en forme de grenade » (or jaune, 17 rubis et diamant) créé en 1949 associe le fruit qui est symbole de fertilité avant d’incarner la vie éternelle dans un cœur plutôt romantique et qui sur-réalise la vie et l’amour.
La même année, le « cœur en rayon de miel » (or jaune, 13 diamants, rubis) exprime un amour divinisé. En effet le miel exprime un cadeau des dieux, et une douceur de vivre en plus d’être souvent source de guérison.
Et en 1953, Salvador Dali réalise le « cœur royal ». Un cœur anatomique en rubis (or jaune, rubis naturels, saphirs naturels, émeraudes naturelles, aigue-marine, péridots, grenat hessonite, améthyste, diamants, perles) et qui bat grâce à un mécanisme à moteur, inséré dans un grand cœur d’or en forme d’ex-voto.
L’Amour romantique est la dernière forme de légende dont on aime à se souvenir à la Saint Valentin. Cet amour est idéalisé, passionné, exalté, quelque fois excessif. Il mérite donc des cœurs, à profusion.
Le film « Pretty Woman » incarne cet amour romantique et on se souvient de Richard Gere offrant une sublime parure de cœurs, de diamants et rubis, à Julia Robert avant de l’emmener à l’Opéra. En fait c’est l’équipe du film qui a été charmé par ce bijou de la Maison Fred présenté à Berverly Hill. Depuis cette scène est devenue mythique et la Maison Fred a imaginé en 2021 plusieurs variantes de cette parure dont la collection se nomme désormais Pretty Woman.
Le plus gros diamant en forme de cœur du monde est une pierre de 92 carats montée en pendant sur un collier de perles de culture. Il se nomme La Légende et a été vendu chez Christie’s Genève en 2017 pour le record mondial de 15 millions de dollars.
Si comme moi vous aimez les cœurs, il y a le cœur en arabesque d’Isabelle Langleois. Créé en 1992, la créatrice ressort cet amour de pendentif comme un fétiche pour 2022 en 3 ors jaune, blanc ou rose et 3 dimensions.
En pendentif toujours, l’intemporel cœur de Piaget est graphique et sobre.
Chez Lydia Courteille le cœur de rhodochrosite de la bague Flamingo est au centre du couple de flamants roses en saphirs, rubis et diamants noirs.
Chez Dior comme chez Flav Paris c’est Cupidon qui est figuré. Pour Dior, en rubis sur un mouvement de diamant. Et Flavie, sertit en clos le diamant cœur central dont la flèche est également de diamants.
J’ai toujours un crush pour le cœur graphique et pourtant organique d’Amélie Viaene qui a 2 portés : directement enforcé sur le doigt ou en pendentif. Elle en a même réalisé un modèle bracelet.
Enfin j’ai eu un coup de cœur pour le modèle Secret de la jeune Maison Mouche. C’est un cœur anamorphose. Suivant votre regard sur le bijou vous verrez un cercle ou un cœur ! Un modèle au design épuré très moderne qui cache notre cœur de midinette.