Le 19 septembre 1991, la plus ancienne momie naturelle est retrouvée dans le val de Senale en Italie à 92 mètres de la frontière autrichienne. Les savants vont appeler Ötzi cet homme qui date du Néolithique final donc vers 2600 avant Jésus Christ et qui est l’une des plus importantes sources de connaissance du mode de vie des hommes de cette époque. Et ce témoin de la protohistoire porte déjà des marques du port de boucles d’oreilles, piercing et tatouage.
On mesure donc combien nos envie de boucles d’oreille et le placement d’objet-bijou sur le corps est intimement lié à notre humanité.
La décoration de l’oreille est hautement symbolique
La décoration de l’oreille, par perçage ou serrage est d’un symbolisme fort parce que l’oreille elle-même est toute une symbolique.
- Dans l’iconographie antique, en Egypte mais aussi en Grèce ou chez les romains, les oreilles sont le symbole de l’attention des dieux envers les fidèles.
- En Babylone, Shamash est le dieu à l’oreille ouverte. En Inde, les grandes oreilles, symbole de la connaissance et de la perfection attestent de la sagesse de Bouddha et les oreilles de Ganesh séparent le bien du mal et ouvrent les voies du savoir.
- Chez les Incas, les personnages de haut rang étaient appelés les grandes oreilles et en Chine les oreilles longues font référence à la noblesse et au mérite.
- Chez les Dogons l’oreille représente le double appareil sexuel mâle et femelle : le phallus avec le pavillon et la matrice avec le conduit auditif.
Comme Gargantua, de nombreux dieux et héros sont nés de l’oreille de leur mère, d’ailleurs la conception de Jésus au cours du haut Moyen Age est réputée résulter de la pénétration du Saint Esprit dans l’oreille de Marie. Par ailleurs, c’est derrière l’oreille que siège Némésis, la déesse de la juste colère des Dieux. Quand au lobe de l’oreille il est considéré comme le siège de l’attention et de la mémoire.
Lié à l’acupuncture, l’auriculothérapie inventée en 1957 par le Dr Paul Nogier pose comme principe que l’oreille incarne tout le corps. Pour d’autres, la forme de l’oreille donne lieu à des interprétations liées à la psychologie de son porteur. En tout cas, siège de l’écoute active ou passive, l’oreille est une porte d’ouverture au monde.
La parure d’oreille est doublement symbolique
Ceci nous amène à la réflexion suivante. Si l’oreille est symbole, la parure d’oreille est doublement symbolique. En effet le port des bijoux ne nécessite usuellement pas l’atteinte au corps. Les bagues, colliers, bracelets s’enfilent ou se posent sur le corps sans qu’il soit nécessaire pour cela de pénétrer le corps.
La parure de l’oreille revêt donc une charge émotionnelle forte et techniquement il y a 3 solutions pour porter un bijou d’oreille : percer l’oreille, ou ne pas percer l’oreille, ou encore porter un bijou dont une partie pose dans l’oreille percée et l’autre partie s’accroche sans percer l’oreille.
Dans le cas de notre momie Ötzi, on sait que les oreilles étaient percées mais on ne sait pas à quelle conception cette façon de porter la parure d’oreille répondait. Toutes les tribus primitives d’Afrique, d’Asie ou d’Océanie pratiquaient le piercing d’oreille pour des raisons magiques, esthétiques ou initiatiques.
On sait que les plus anciennes boucles d’oreille, pour oreilles percées ont été découvertes sur le site de Chifeng en Mongolie et dans les sépultures royales d’Ur en Mésopotamie. Ces bijoux pour oreilles percés datent de l’Age de Bronze.
J’ai trouvé beaucoup de sources pour l’histoire de la boucle d’oreille qui est donc à la conjonction de l’histoire du bijou et de celui du piercing où les différentes formes correspondent à l’évolution de la mode. Par contre l’histoire des bijoux pour oreille non percées est plus compliquée à trouver.
Dans le site ambreagorn.free.fr, l’auteur Didier COVA, explique que les bijoux d’oreille pour oreilles non percées s’appellent des Kaffas. Il a recensé ces bijoux dans plusieurs époques.
Un tour d’oreille aux têtes de Lion de Moldavie datant -600 av JC et conservé au musée de l’Hermitage à Saint Pétersbourg
Issu du trésor de Vani en Géorgie, un autre bijou entoure complètement l’oreille et descend aussi sur le lobe et date de -400 à -350 ans av JC.
Il attire notre attention sur les représentations anciennes de femmes indoues qui portent des tours d’oreille.
Il montre les ornements traditionnels thaïlandais où les tours d’oreilles traditionnels forment des grandes pointes derrière l’oreille.
Il a retrouvé un portrait de Lavina Fontana en 1592 où la vénus porte un tour d’oreille en perles.
Il souligne dans la parure de rubis et diamants portée par la Princesse Mary du Danemark, les crochets de fixation des girandoles qui sont des tours d’oreilles très fins et invisibles sous les cheveux.
Il explique qu’entre 1942 et 1948, au Mexique, Hubert Harmon réinvente le tour d’oreille avec un fil de métal flexible qui s’enroule autour de l’oreille. Puis, en 1950 aux Etats Unis, Marcel Boucher dépose un brevet pour des tours d’oreille appelé « Earrites ». Né à Paris en 1898, Marcel Boucher est tout d’abord apprenti chez Cartier qui l’expédie en 1923 dans son atelier New-yorkais. Puis il entre chez Mazer Brothers avant de lancer sa marque de bijoux fantaisie en 1937. Ses earrites ont la grâce de la joaillerie et les strass de la bijouterie alors elles font un tabac et même Marilyn Monroe en portera.
Le piercing est une impulsion à la création de nouvelles parures d’oreille
Globalement c’est depuis les années 2000 et le retour du piercing que les créations autour des oreilles se développent le plus, pour les oreilles percées comme les non percées.
Aujourd’hui on pourrait distinguer 3 types de ces bijoux :
- Le tour d’oreilles qui fait le tour de l’oreille sans perçage
- Un autre tour d’oreille qui peut pénétrer dans l’oreille et souligne l’arrondi auriculaire
- Les bagues ou manchon d’oreilles qui entourent le cartilage sans perçage en forme d’anneau ou qui font tout le tour de l’oreille.
Dans la collection haute joaillerie « Vu du 26 » de Boucheron, le tour d’oreille en titane Nuri est un extraordinaire perroquet où aigue marine, béryl jaune, tsavorites, diamants et saphirs de toutes les couleurs créent un motif d’oreille chatoyant et multicolore.
Chez Piaget, les tours d’oreille s’appellent Golden Oasis, Mediteran Garden, ou Sunny side of life. Ils sont en or blanc ou jaune et les pierres précieuses se situent de part et d’autres de l’oreille.
Chez ces 2 joailliers, le tour d’oreille se vend assorties d’une puce d’oreilles pour un porté asymétriques des 2 oreilles.
Chez Messika il y a de tout et tout en diamants bien sûr ! Des manchons d’oreilles à accrocher comme on veut du lobe à l’hélix. Ou bien Amzone qui est une barrette à plusieurs crochets de diamants sur une oreille assortie à une puce pour l’autre oreille. Et dans la collection Messika by Kate Moss, le K est un lasso de diamants qui fait le tour complet de l’oreille.
Dans la nouvelle collection de Tazaki la pièce appelée Waterfall fait le tour derrière l’oreille avec une grosse boule d’or en haut et en bas. Elle a une déclinaison où des rangs de perles partent du milieu de l’oreille et chutent jusqu’à la clavicule pour un porté très spectaculaire. Et dans les collections Nacreus et Surge il y a des manchettes qui s’accrochent en haut des oreilles comme des capuchons précieux.
Chez Caterina Murino, le tour d’oreille en saphirs et stavorites, représente le Myrte, la plante sacrée d’Aphrodite, symbole du pays Sarde.
Chez MW Paris le tour d’oreilles Dragopegasus accroche sous le lobe un curieux animal mythique réinterprété façon Pégase.
Chez Marie Mas, la joaillerie est animée jusque dans ses anneaux manchettes d’oreilles Swinging où en son milieu, la pierre en marquise est réversible. La pièce Swiveling fait le tour derrière l’oreille et la pierre est placée juste sous la branche de vos lunettes et bien sûr elle est réversible autour d’un anneau sertie de diamants, à l’autre extrémité sous le lobe une chainette agite un diamant en serti clos. Le modèle Queen Wave s’accroche sur le devant du lobe, traverse le perçage pour réapparaitre sur tout le contour de l’oreille avec un serti en diamant ou en couleur.
Sous le design de Philippe Airaud, on trouve chez Otzar treasure des tours d’oreille qui s’accrochent au lobe et décorent le haut de l’oreille d’une ou 2 pierres ou alors l’entoure d’une guirlande de pierres en petites boules. Le même designer a dessiné pour la nouvelle maison de joaillerie DFLY, un modèle de manchettes d’oreille appelée Dknox très pures et contemporaines avec diamants de synthèse.
Les jumeaux joailliers de la Maison Persta ont imaginé un anneau d’oreille avec une perle en goutte et un anneau double qui se porte également en bague sur la main.
En argent ou vermeil, les modèles Virta, Dina ou Aino de Mara Paris ont aussi un porté changeant, sinueux ils se laissent pendre ou s’enroulent sur ou autour de l’oreille. Des bijoux avec beaucoup de caractère et résolument a-genre.
En argent également, chez la jeune marque Loeys les modèles Gaya, Opus et Zak se caractérisent par leur forme organique et leur porté résolument en travers de l’oreille. Vous les trouverez aussi sur la marketplace 58 facettes.
Enfin, chez De la Forge, en laiton doré, on trouve beaucoup de modèles de faux piercings. La Woody est un anneau de bois dont la circonférence s’orne d’une rangée de perles dorées. La Cassiopée rayonne de petites planètes de boules dorée sur une boucle XL. Et Andromède comporte 3 anneaux circonvoluant autour d’une perle en suspension.